8 - La CROIX-ROUSSE, brève histoire : Au XVII° et XVII° "la colline qui prie".
Suite 2 : Le Plateau, les Pères Augustins.



 

Bonjour à tous les lecteurs du Gone !

 

Me revoilà. J'espère que votre sanctification est maintenant en bonne voie et que vous êtes prêts à persévérer aujourd'hui avec le Plateau ?

 

En tout cas vous voilà certainement convaincus que les Pentes, à partir du XVII° siècle et, comme nous le verrons, jusqu'à la Révolution, avaient été l'objet d'une véritable "colonisation religieuse".

 

Tranquillisez-vous, le Plateau, bien occupé par les jardiniers, résistera davantage !

Mais auparavant et en introduction, je voudrais dire un mot des paroisses desservant notre colline !

 

Jusqu'à la Révolution, et plus précisément 1993, nous avons vu que notre colline était surtout habitée le long de l'axe Grande-Côte – Grande-Rue, ailleurs les maisons étaient clairsemées :

De quelles paroisses dépendaient ces habitants pour faire leurs Pâques au moins une fois l'an, recevoir les sacrements de Baptême et de Mariage et  se faire enterrer religieusement ?

A part le hameau de Cuire, qui était déjà paroisse et possédait une chapelle (la chapelle du Château au bord de la Saône), la Croix-Rousse, c'est à dire le reste du Plateau et les Pentes, dépendait de trois paroisses :

A l'ouest, approximativement de la Saône jusqu'à la Côte Saint Vincent (Montée des Carmélites) et son prolongement sur le Plateau, c'était la Paroisse Saint Vincent dont l'église était au nord de l'actuelle (voir "Le quartier Saint Vincent" republié récemment) .

 

Au centre, approximativement entre la Côte Saint Vincent et la Grande-Côte-Grande Rue, c'était la paroisse de Notre Dame de la Platière dont l'église se trouvait, tout près de Saint-Pierre et  Saint Saturnin, à l'emplacement de notre actuelle rue de la Platière dans le 1° arrondissement (Bonjour Thierry !).

A l'ouest, entre la Grand-Côte – Grande-rue et le Rhône, c'était la paroisse Saint-Pierre – Saint-Saturnin que tout le monde sait bien situer maintenant !

 

Autant dire que séparé de la ville par les remparts de Saint Sébastien, notre faubourg du Plateau de la Croix-Rousse se sentait bien coupé de ses églises. Les croix-roussiens qui se plaignaient d'être à l'écart, n' auront de cesse de demander une paroisse bien à eux, comme en témoignent leurs cahiers de doléances  pour les états généraux qui auront lieu en 1789 ou encore quand ils forment une seule commune avec Cuire (dès 1788).

Mais d' autres que les habitants du Plateaux, avaient bien remarqué ce "désert spirituel", ce sont les Augustins Déchaussés ou Réformés que l'on nommait aussi "les Petits Pères".

Henri IV avait accédé à la demande du pape Clément VIII, qui, dans la mouvance du Concile de Trente, demandait que cet ordre soit accueilli dans le royaume de France.

Le Père Charles de Sainte Agnès, l'un des leurs,  écrivit donc aux Echevins de Lyon, une lettre où il leur disait :

"Qu'il vous plaise de admettre les suppliants au lieu de la Croix-Rousse, lung de vos faulxbourgs ou il n'y a aulcuns relligieux ni mesmes aucune église. Ce qui cause la perte de plusieurs âmes… Pour a ce remédeier ils désirent d'y travailler pour la gloire de Dieu soulz loffre qu'ils font de se retirer audit faulbourg. S'y loger à leurs fraits et y faire leurs exercisses comme il leur est permis par sa Majesté…"  (Cité par Max Bobichon dans "Saint Denis de la Croix-Rousse")

Le 9 mai 1624, les Echevins leur accordent la permission de s'installer à condition qu' ils ne fassent pas la quête à Lyon. En effet il ne fallait pas faire du tort  aux quêtes faites par l'Aumône Générale de la ville, pas de concurrence  !

Nos Petits Pères s'installent alors provisoirement dans une maison de la Grande-Rue, au n° 54.

Le 19 mai 1625, ayant trouvé un terrain, ils l'achètent. C'était la moitié nord du Saugey (voir chapitre 5), tout près de l'ancien hameau et de la fameuse croix qui était rousse . C'est sur ce terrain que sera construit, plus de deux siècles plus tard l'Hôpital de la Croix-Rousse… Nous n'y sommes pas encore !

Mais pour  construire il fallait que nos religieux trouvent de l'argent !  A force de démarches des Pères, les Echevins de Lyon finirent par accepter que le monopole de l'Aumône Générale soit transgressé et nos religieux pourront enfin aller quêter à Lyon.

Les Pères Augustin avaient eu une conduite très courageuse durant la peste de 1628, deux des douze pères moururent en secourant les malades, et les Echevins comme la population surent leur témoigner leur reconnaissance par leurs dons.

Le 8 avril 1629 la première pierre de leur église est solennellement posée. Cette église portera le vocable de Saint Denis, l' archevêque de Lyon qui les avaient accueillis s'appelait en effet Denis de Marquemont.

Un chemin reliant la Grande-Rue au "chemin tendant de la porte Saint Sébastien à l'Ile Barbe par la Croix de Bois" (rue de Cuire actuelle), fut alors tracé au sud de leur propriété pour la délimiter des lotissement du reste du Saugey, ce chemin reçut le nom de chemin Saint Augustin et sera appelé plus tard rue des Pères, puis rue Saint Denis et enfin rue Hénon.

Puis, au fil des ans, les bâtiments et le cloître des Augustins s'élevèrent…

Les Pères Augustins demeurèrent là, très bien implantés, jusqu'à la Révolution. Certes le faubourg n'avait pas sa paroisse mais il avait déjà son église et l’on peut penser que les registres de Notre Dame de la Platière, sur le territoire  de laquelle Saint Denis s'élevait, servaient déjà, à la fin de la période, à l' inscription des actes de baptême et de sépulture que les religieux célébraient dans le faubourg. Saint Denis ne deviendra paroisse qu’en 1791 et c’ est à partir de cette date que nous trouvons, aux A-M de Lyon, des registres pour les naissances à la Croix-Rousse, les registres de mariage et de décès datent, eux, de 1793.

Saint Denis fut aussi, pendant toute cette époque, le centre de plusieurs confréries : La "Confrérie de la Bonne Mort" , la "Confrérie du Saint Sacrement", la  "Confrérie de Notre Dame des Sept Douleurs".

Max Bobichon note dans son livre que :

«A Saint Denis, à travers les documents qui nous restent de la Confrérie de la Bonne Mort et de la Confrérie du Saint Sacrement, nous voyons un peu l’action très importante de ces hommes et de ces femmes dans le quartier, au service de la Communauté Chrétienne.

Le nombre des participants est assez grand… Pour ce que nous trouvons à Saint Denis, il oscille entre 200 et 400. »

Pèlerinages, processions, messes, prières, fêtes patronales,  faisaient partie du quotidien de la vie de ces confréries, chacune ayant sa bannière. (Tout ceci est assez inimaginable de nos jours et en un temps qui a inventé, fort heureusement, la laïcité !).

Ces confréries avaient aussi un rôle social et caritatif important. Ainsi il y eut même une Confrérie composée d'ouvriers qui, en 1745, assurait une compensation financière aux ouvriers malades.

Mais les lignes s'allongent sur ce "couriel"  (ce mot québécois, quoique non franco-provençal, est quand même plus joli que mail ! Restons au moins francophone !) et je vais encore être obligé d'interrompre ce chapitre pour le continuer au prochain numéro.

 

D' ici là tâchez tous moyen de bien vous porter !

 

Le Gone.

 

 

En marge et avant de nous quitter je pense qu'il est intéressant pour tout le monde de la généalogie, que je transcrive ici une note mon ami Max, sur les confréries.

 

 

QU’EST-CE QU’UNE CONFRÉRIE ?

 

« Il y eut toujours des groupements dans l’Église. C’est surtout à partir du XIII° siècle qu’on voit les Confréries se multiplier. C’est à partir de la Réforme qu’on ouvre les Confréries aux Dames et c’est à partir de la moitié du XVII° siècle que les nouvelles  "agrégations" qui se forment sont appelées "congrégations".

La structure semble à quelque chose près toujours la même. Il y a un "conseil central" avec bureau et dont le curé n'est pas toujours le président mais l'aumônier. Les "confrères", avec un règlement très précis, fonction du but de l'association, se réunissent à intervalles réguliers pour prier (il y a des prières prescrites), vérifier leur action et mettre à jour leur cotisation. Ils sont groupés par "dizaine". »

(Max Bobichon dans « Saint Denis de la Croix-Rousse » page 32