La Gabelle

 

Le mot 'Gabelle' est un terme général s'appliquant à toute espèce d'impôts : il y a une gabelle des vins, une gabelle des draps... etc. Mais, de bonne heure l'habitude fut prise de l'appliquer seulement à l'impôt sur le sel. Le sel fait partie de cette catégorie de denrées indispensables à la population depuis toujours.

 

Il était établi par commune un recensement des redevables (les chefs de famille) avec les indications nécessaires à une estimation équitable de la taxe selon la composition du foyer du redevable (épouse, enfants, bétails selon leur nature, …) mais aussi la profession quand elle revêtait une importance par rapport à une plus grande utilisation de sel pour certains artisans ou commerçants…

 
L'impôt perçu sur le sel existe déjà sous Saint Louis (1214-1270). Il prend un caractère permanent avec les ordonnances de Philippe VI, de 1341 et 1343, organisent un monopole du sel destiné à assurer l'approvisionnement des consommateurs et des recettes du trésor royal. Par ses ordonnances, il restreignit la vente du sel aux greniers royaux : les chambres à sel, où, à son prix marchand, s'ajoutaient les droits du roi, déjà variables selon les provinces. Cependant, une très grande diversité, due au fait que certaines régions du royaume exportaient leurs excédents alors que d'autres manquaient de sel, caractérise cet impôt.
C'est sous Colbert que la législation des gabelles fut fixée dans ses traits essentiels par la grande ordonnance de mai 1680.
 
 

La France fut alors partagée en six régions. La plus grande partie du royaume était soumise au régime de «grande gabelle». En Île-de-France, Orléanais, Berry, Bourbonnais, Perche, Bourgogne, Champagne, Picardie, Normandie, Maine, Anjou, Touraine, le sel était fortement taxé, Non seulement le sel y était très cher, mais encore la consommation d'une certaine quantité minimum de sel y était obligatoire : un minot de sel (12 litres réputés peser 100 livres ) par quatorze personnes au dessus de huit ans; et cela pour pot et salière seulement, le sel destiné aux salaisons était tout différent et devait être levé en sus. Cette vente était néanmoins volontaire parce que l'on pouvait acheter quand on voulait et parce que les pauvres pouvaient s'approvisionner au détail, et même ne prendre que la quantité de sel qu'ils voulaient. Quoique, en principe, nul n'en fût exempt, certains bénéficiaient du privilège de «franc-salé» qui les dispensait de cette obligation et les faisait bénéficier d'un prix réduit.

Le prix d'achat aux marais salants fut fixé en 1711 à 410 livres le muid ( 1 muid = 48 minots ). Le prix de vente varia beaucoup sous l'ancien régime, mais, sous Louis XVI, l'état vendait le sel environ 70 fois le prix qu'il l'avait acheté.

Toutes les provinces du Sud-Est, anciennement ou nouvellement rattachées au royaume, connaissaient le régime de «petite gabelle»: elles payaient le sel moins cher et l'organisation des greniers à sel y était moins rigoureuse; en Lyonnais, Mâconnais et Dauphiné, le commerce était libre. Les provinces du Sud-Ouest et l'Auvergne s'en étaient «rédimées» (rachetées), au XVIe siècle, par un seul versement. Dans les pays de salins (duché de Bourgogne), un droit de gabelle était perçu mais la contrainte n'existait pas. La basse Normandie jouissait du régime de «quart bouillon» (taxe 25 %). Certaines provinces en étaient exemptes: Bretagne, Boulonnais et Calaisis, Artois, Flandre, Hainaut, pays de Gex, Béarn, Navarre

Outre le prix élevé d'une denrée nécessaire, le grand vice de la gabelle était cette diversité de prix variables de 1 à 50 selon les provinces qui offrait une tentation importante à la contrebande.
Celle ci était pratiquée  par "les faux sauniers"" qui étaient chassés par les 'gabelous'. Les peines étaient terribles : contrebande à pied et sans armes : 200 livres d'amende, mais en groupe : 9 ans de galère. Necker rapporte que la contrebande amenait annuellement l'arrestation de 2300 hommes, 1800 femmes et 6600 enfants !
 
À la fin de l'Ancien Régime, le produit de la gabelle était considérable: en 1786, 58,5 millions de livres sur un total de 144 millions pour la ferme générale. Dans le mémoire de Necker au roi, en 1781, le ministre note que le remplacement de la gabelle, souhaité par tous les sujets, est difficile car, dit-il, ce seul impôt «rapporte autant à Votre Majesté que l'impôt sur toutes les propriétés foncières du royaume»
 
Aucun impôt n'a été aussi détesté que la gabelle et c'est avec des cris de colère que les cahiers de doléances de 1789 en réclamèrent la suppression, elle fut supprimée en 1790.
 
 
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