Naissance du calendrier grégorien



Les Romains, les Portugais et les Espagnols qui se couchèrent le soir du jeudi 4 octobre 1582 eurent le privilège de se réveiller non pas un 5 octobre mais un... 15 octobre (*).

La raison de cette anomalie est que le pape Grégoire XIII avait décidé de supprimer les dix jours suivant le 4 octobre 1582 pour rectifier une bonne fois pour toutes les erreurs du calendrier antérieur et permettre l'entrée en application de son propre calendrier.

Auparavant, les Européens s'en tenaient au calendrier julien, ainsi nommé d'après Jules César, premier grand ordonnateur de la mesure du temps.

L'avènement de l'ère chrétienne

En 532 de notre ère, suite aux travaux de Denys le Petit, un moine de Rome, l'Église décide de compter les années à partir de l'année de la naissance du Christ.

Denys le Petit situe celle-ci 753 ans après la fondation de Rome, l'année de référence des anciens Romains (on pense aujourd'hui qu'il s'est trompé de 5 ans, le roi Hérode, contemporain de la naissance du Christ, étant mort en l'an 750 de la création de Rome).

Il faudra plusieurs siècles avant que s'impose le nouveau comput (ou calendrier des fêtes) dans les écrits et la pratique quotidienne. Au IXe siècle, au temps de Charlemagne, les clercs continuent de compter les années à partir de l'année d'intronisation de l'empereur régnant (ce système prévaut encore dans l'empire du... Japon).

Vers la fin du Moyen Âge, des astronomes et des savants comme Robert Grosseteste ou Roger Bacon s'aperçoivent que l'année calendaire dépasse l'année solaire de... 11 minutes 14 secondes (il ne s'agit pas vraiment d'une découverte car le Grec Hipparque avait déjà mesuré la durée véritable de l'année solaire... un an avant la réforme de Jules César).

La Terre tourne autour du Soleil en 365 jours 5 heures 48 minutes et 46 secondes (environ) alors que l'année julienne compte 365 jours et 6 heures en tenant compte des années bissextiles.

Quinze siècles après la réforme julienne, le cumul de cette avance conduit à un décalage de dix jours entre l'année solaire et l'année calendaire : le 1er janvier du calendrier julien est repoussé vers le printemps... et les autres jours à l'avenant...

Ce décalage pose des problèmes aux savants de l'Église qui doivent fixer chaque année la date de Pâques. En conséquence, en 1563, le concile de Trente confie au Saint-Siège le soin de réformer le calendrier.

Il importe d'une part de raccourcir les années calendaires pour les mettre en accord avec les années solaires, d'autre part de supprimer l'avance prise par le calendrier sur les saisons depuis la réforme de Jules César (du fait de cette avance, le 1er janvier «julien» coïncidait au XVIe siècle avec le véritable 11 janvier «solaire»).

La réforme de Grégoire XIII

Né en 1502 près de Loudun sous le nom de Hugues Bonnecompagne, monté sur le trône de Saint Pierre à 70 ans, le pape Grégoire XIII se rallie à l'avis des savants réunis en commission, notamment le médecin romain Aloisius Lilius, le jésuite Christophe Calvius de Bamberg, le théologien Vincenzo Laureo et le juriste Séraphin Olivier.

Il décide le 24 février 1582 de supprimer désormais trois années bissextiles sur cent afin de mettre le calendrier en concordance avec l'année solaire par une opération dite «métemptose» - ou équation solaire -.

C'est ainsi qu'il attribue 365 jours, et non 366, à trois sur quatre des années qui inaugurent les siècles. De la sorte, les années 1700, 1800 et 1900 ont été privées du 29 février mais l'année 2000 l'a conservé.

Cette modeste réforme ramène à 25,9 secondes l'écart avec l'année solaire (une broutille).

Par ailleurs, le pape décide de rattraper les dix jours de retard depuis la réforme de Jules César. Le rattrapage se produit dans la nuit du 4 au 15 octobre de la même année.

Mais nous sommes en pleine guerre de religion entre catholiques et protestants. Seuls les États acquis à la Contre-Réforme catholique adoptent le calendrier du pape. Ce sont les États pontificaux, l'Espagne et le Portugal.

La France y vient deux mois plus tard, dans la nuit du 9 au... 20 décembre 1582, l'Allemagne du sud et l'Autriche en 1584, la Prusse en 1610, l'Allemagne du nord en 1700, la Grande-Bretagne en 1752, le Japon en 1911, la Russie en 1918 et la Grèce en 1923...

Le 1er janvier 1622, le Saint-Siège complète l'aménagement du calendrier. Il décide que partout dans le monde catholique, l'année calendaire commencera désormais ce jour-là, le 1er janvier. L'empereur Charles Quint et le roi de France Charles IX avaient déjà mis en œuvre cette mesure dans leurs domaines respectifs un siècle plus tôt.

En 1793, les révolutionnaires français tentent mais en vain d'abolir le calendrier grégorien auquel ils reprochent une trop forte connotation religieuse.

Aujourd'hui, le calendrier grégorien est reconnu dans le monde entier ou à peu près. A preuve le succès des célébrations de l'An 2000 sur toute la planète.

Conséquence importante

Les historiens datent les événements d'un pays quelconque d'après le calendrier en vigueur en ce pays, à ce moment-là.

Les deux révolutions russes de 1917 sont baptisées d'après le calendrier julien en vigueur dans l'ancienne Russie. La révolution démocratique dite «Révolution de Février» s'est déroulée en mars selon le calendrier grégorien et la révolution bolchevique, dite «Révolution d'Octobre», en novembre.

Il peut y avoir des discordances sur les dates. C'est ainsi que les traités d'Utrecht de 1712-1713 ne sont pas datés du même jour selon que l'on a affaire à un historien britannique ou à un historien français ou espagnol.

Enfin, on peut noter que Cervantès et Shakespeare sont morts le même jour, le 23 avril 1616, mais à onze jours d'intervalle !

Le savant anglais Isaac Newton est né le 25 décembre 1642 selon le calendrier julien en usage dans son pays à ce moment-là et le 4 janvier 1643 selon le calendrier grégorien en usage ailleurs.
Les Chinois adoptent le calendrier grégorien
La Chine a adopté le calendrier grégorien suite à l'avènement de la République, le 10 octobre 1911.

Le précédent calendrier aurait été inventé par le légendaire empereur jaune Huangdi, en l'an 2637 avant JC !

Il s'agissait d'un calendrier luno-solaire qui comptait douze lunes de 29 ou 30 jours, soit 354 jours. Pour corriger le décalage d'avec l'année solaire, on rajoutait en temps opportun un mois intercalaire après le cinquième mois lunaire. Le premier de l'An correspondait à la deuxième pleine lune après le solstice d'hiver.

Le temps chinois est encore organisé autour de deux cycles, l'un de douze années, l'astrologie populaire associant un animal à chacune d'elles, l'autre de soixante années.


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