9 - La CROIX-ROUSSE, brève histoire : Au XVII° et XVII° « la colline qui prie ».



Suite 2 : Le Plateau, les autres maisons religieuses.

 

Bonjour à tous les rescapés de la Colline !

 

Nous nous sommes arrêtés longtemps chez les Augustins Réformés car ils ont été à l’origine de la première paroisse de la Croix-Rousse :  Leur église Saint Denis deviendra la paroisse Saint Augustin sous la révolution pour redevenir Saint Denis par la suite…

 

Aujourd’hui nous allons visiter plus rapidement, enfin je l’espère, les autres maisons religieuses du Plateau et nous verrons qu’avec certaines institutions, le Plateau était déjà à la pointe de l’enseignement et de l’éducation !

 

Le mieux, je crois, est de citer d’abord Josette Barre dans « La colline de la Croix-Rousse » (ELAH 2001 p. 40):

«  Dans le secteur occidental du Plateau…Les Missionnaires de Saint Joseph achètent en 1686, une propriété limitrophe de la Belle-Allemande et y élèvent deux bâtiments pour recevoir les prêtres employés à des missions à la campagne et à instruire le peuple. Entre 1738 et 1747, deux séminaires s’implantent à l’ouest du chemin de Granjard (rue Philippe-de-Lasalle) : Celui de Saint Pothin sur une ancienne possession du marchand allemand Cléberger, et celui de Saint Charles. A proximité et grâce à des dons, s’ouvrent les Petites Ecoles tenues par des religieux qui accueillent les filles et garçons pauvres de la paroisse de Cuire-la Croix-Rousse. Pour les enfants riches, les Jésuites tiennent un pensionnat entre le chemin de Terrenoire (rue Henri- Gorjus) et le chemin d’Enfer (Denfert-Rochereau) »

 

Je vais essayer maintenant d’apporter quelques compléments et parmi les maisons citées, arrêtons-nous aux Jésuites, aux Petites Ecoles et au Séminaire Saint-Charles.

 

Aujourd'hui, où souvent les slogans tiennent lieu de pensée et où le sens de l'histoire reste encore le fait des seuls spécialistes, il est devenu d'usage de dénigrer l'œuvre de l'Eglise dans les siècles qui nous ont précédés. La Grande Révolution Française, la guerre des écoles et l' anticléricalisme (même justifié par un intolérable cléricalisme, le sectarisme engendrant le sectarisme) sont passés par là !  Mais, sans remonter à Charlemagne (ce sacré Charlemagne !) je crois que l’ on aurait tort de faire remonter  l'origine de l'école à Jules Ferry, quels que soient les mérites de ce grand homme.

 

Certes, avant lui, le savoir et la culture ont été surtout le privilège des clercs et de certaines "élites".  A Lyon, ville privée d'université jusqu'en 1896 (les facultés de Droit 1875, de Médecine 1877, de Science et de Lettres ont été fondées peu avant), ce sont les Jésuites  qui jusqu’ à  leur suppression en 1763, enseignèrent les enfants des classes aisés de la société. Le Collège de la Trinité qu’ils dirigeaient fut rouvert en 1603 et atteignit neuf cents élèves pour étudier les Lettres, la Philosophie, les Sciences et la Théologie. Ce fut le haut lieu intellectuel de Lyon avec une bibliothèque de 40.000 volumes. Un deuxième établissement, le "Petit Collège", fut ouvert en 1628 dans le vieux Lyon, il recevait 160 élèves. Et au XVIII° nous trouvons encore, sur le plateau de la Croix-Rousse,  un pensionnat jésuite..

 

Enseignement pour les élites, certes, mais les autres ? Comme généalogistes, nous avons peut-être bien rencontré tel ou tel enfant de milieux intellectuel très simple qui, pris en charge par leur curé, avait accédé à la culture et à un certain niveau dans la société, mais il s'agissait alors de cas isolés.

 

Cependant le Concile de Trente (1547) avait prescrit que chaque curé devait entretenir un maître pour enseigner la lecture, l'écriture , le chant et le calcul sans oublier le catéchisme, mais il faudra attendre  pour voir la réalisation de ce voeu : les réformes sont toujours longues à mettre en place !

 

 Lyon fut certainement la plus rapide à répondre  et au XVII° nous assistons,  toujours grâce à l'Eglise, à la naissance des écoles populaires, et la Croix-Rousse sera concernée.

 

A Lyon la Compagnie du Saint Sacrement, sorte d' intelligentsia influente composée d'ecclésiastiques importants mais aussi de magistrats, d' anciens échevins, de militaires, de marchands… avait réfléchi aux moyens pour établir des écoles publiques dans la ville et adressé un vœu dans ce sens au Consulat. Mais en lien avec cette Compagnie, la grande figure qui oeuvra pour l'enseignement des enfants pauvres fut Charles Démia.

 

Né à Bourg en 1637, Charles Démia, fils du secrétaire du lieutenant général au gouvernement de Bresse,entra au séminaire Saint Irénée en 1660 et fut ordonné prêtre en 1663. Dès 1664, l'Archevêque, Camille de Neuville (d' une famille bien connue !), le chargea de visiter les paroisses de la Bresse, du Bugey et de la Dombes, car ces régions faisaient alors partie du diocèse de Lyon. Au cours de cette visite Charles découvre la misère intellectuelle des habitants et la nécessité d'ouvrir des écoles populaires  pour les enfants pauvres s' impose à lui. Il devait consacrer toute sa vie à cette tâche. Il ouvrit une première école de garçons dans le quartier Saint Georges, quartier populaire par excellence car là se trouvait la majorité des tisseurs de Lyon. Plus tard une école de filles suivra.  C'était, en 1667, la naissance des "Petites Ecoles" origine de nos écoles primaires.  A la mort de Charles Démia, en 1689, on en dénombra seize pour filles et garçons suivant, séparément bien sûr, une scolarité de quatre ou cinq ans.

 

Charles Démia savait que la qualité des écoles dépendait de la qualité des maîtres, aussi pour leur formation, il fonda le "Séminaire Saint Charles"  qui reçut les clercs et laïcs se destinant à l'enseignement. Les femmes, elles, furent regroupées dans la communauté des "Dames des Ecoles", future congrégation des Sœurs Saint Charles. Avec ces institutions, nous avons là, en quelque sorte, l'origine des écoles normales !  Et, clin d'oeil de l'Histoire nous trouverons  bien plus tard, sur ce Plateau les deux écoles normales de Lyon, La Croix-Rousse ne fut  donc jamais en retard en matière d'enseignement.

 

Voilà il est temps que j'arrête ici cette histoire  des maisons religieuses de la colline de la Croix-Rousse, la colline qui pria beaucoup. Cette histoire nous a occupés pendant quatre chapitres un peu austères, j'en conviens avec vous… mais le Gone ne s'est pas senti chargé de refaire l'histoire !

 

Au point où nous en sommes, la Grande Révolution se profile à l'horizon et nous allons assister à une accélération de l'histoire qui concernera, au plus haut point, notre Croix-Rousse.  Passant à travers une rude épreuve nos quartiers de la colline connaîtront un développement nouveau qu'il nous reste à voir.

 

Si vous êtes toujours décidé à suivre courageusement le Gone, je vous donne rendez-vous l'année prochaine !  Car il est bon que nous respections la trêve des confiseurs, cela vous reposera sans parler des phalangettes et des neurones assez fatigués de Marc, mon "nègre" !

 

A tous, Joyeux Noël et très bonne fin d'année !

Le Gone.